3.04
Sigismund, premier capitaine des Impérial Fists, observait la noria des containers de métal qui montaient vers le ciel, emportés par les ascenseurs orbitaux des colossales tours Tsiolkovsky du fabricator supplétif Kane qui les acheminaient vers les transporteurs qui les attendaient dans l'espace. Les énormes structures fonctionnaient au maximum de leur capacité, et ce n'était pas encore suffisant car ses capitaines de vaisseau venaient de l'informer qu'un contingent ennemi approchait, venu du nord-est : de l'infanterie, des blindés, des skitarii et au moins l'équivalent de deux legios en machines de guerre diverses.
À ce qu'il semblait, la relative immunité de Mondus Occulum était sur le point de prendre fin.
Rien ne s'était passé comme prévu dans cette mission sur Mars. Sigismund sentit la rage qui bouillonnait sans cesse en lui, ronger les liens de la maîtrise qu'il exerçait sur lui-même. Camba-Diaz et les régiments joviens luttaient pour leurs vies à Mondus Gamma, et les compagnies saturniennes chargées de rompre le siège de la forge d'Ipluvien Maximal avaient dû battre en retraite à plusieurs reprises devant les monstrueuses créations du Mechanicum noir.
Il traversa d'un pas énergique le ballet précisément organisé des serviteurs de manutention et des transporteurs chargés de caisses d'armures et de bolters. Plus loin, l'élégante silhouette du fabricator supplétif dirigeait ses laquais à grands gestes calmes et efficaces à l'aide des bras manipulateurs qu'il s'était récemment fait implanter.
Terni par la poussière des tempêtes tourbillonnantes qui soufflaient sur la caldera effondrée d'Uranus Patera depuis les désolations environnantes, l'or de son armure paraissait ocre à présent, et le blanc et noir de son blason personnel était maculé de traînées jaunâtres. Pourtant, malgré ces souillures, il conservait toute sa superbe et son allure impressionnante.
Une troupe de guerriers en armures similaires à la sienne s'affairait avec la précision et la méthode pour lesquelles les Impérial Fists étaient si bien connus ; ils dirigeaient des groupes d'énormes serviteurs manutentionnaires appartenant à Kane, de manière à sauver le plus d'armures, d'armes et de munitions possibles.
Les compagnies de Sigismund s'étaient posées à Mondus Occulum sans savoir s'il faudrait combattre pour prendre le contrôle de la forge, et leur soulagement avait été immense en découvrant que le fabricator supplétif était toujours loyal au Trône de Terra.
Sigismund lui-même avait dû se reconnaître impressionné par les efforts de Kane pour assurer un transfert aussi organisé que possible des productions de sa forge vers les vaisseaux qui attendaient sur leur ancrage orbital, au sommet des tours Tsiolkovsky. Cependant, malgré tous ces efforts, Sigismund n'ignorait pas qu'ils seraient tout de même contraints d'abandonner au sol la plus grande partie du matériel.
En entendant Sigismund approcher, Kane se retourna, un sourire épuisé sur son visage sans rides.
— Premier capitaine ? lui dit-il. Avez-vous des nouvelles de Camba-Diaz ? Où en sont-ils à Mondus Gamma ?
— Ça va mal, admit Sigismund. Camba-Diaz a réussi à prendre les armureries et les silos de munitions, mais ils se battent à cent contre un. Les forces de ce traître de Chrom l'ont repoussé vers l'astroport, et il a subi de très lourdes pertes. Nous ne parviendrons pas à tenir la forge, mais nous avons réussi à nous emparer d'une grande quantité de matériels tactiques pour les renvoyer sur Terra.
— Les skitarii de Chrom ont toujours été des créatures bestiales, répondit Kane en secouant la tête avec consternation devant la tournure que prenaient les événements. Et ses manipules de robots sont extrêmement nombreux.
Le poing de Sigismund se crispa sur la crosse de son bolter.
— C'est vrai, et je me sens profondément offensé par la pensée que des machines sans cervelle puissent être capables de faire couler le sang de l'Astartes. Assez parlé de Camba-Diaz. Où en êtes-vous en ce qui concerne l'évacuation des armes et des armures ? En aurez-vous bientôt terminé ?
— Nous progressons, répondit Kane. Nous avons déjà expédié plus de douze mille armures Mark 4 et deux fois plus d'armes.
— N'allons pas par quatre chemins, Kane. Il faut accélérer la cadence. Il ne nous reste pas beaucoup de temps.
— Je vous assure que nous faisons aussi vite que possible, premier capitaine.
— Et pourtant, il faut faire plus vite, martela Sigismund. Notre surveillance orbitale a détecté le déplacement d'une importante force ennemie arrivant du nord-est. Ils seront ici d'une minute à l'autre.
Les yeux de Kane papillotèrent tandis qu'il intrachargeait les données des systèmes de surveillance des vaisseaux en orbite, et ses bras manipulateurs se crispèrent en découvrant l'importance des forces qui convergeaient sur sa forge.
— Deux legios ! s'exclama-t-il. Plus de soixante Titans !
— Et tout le reste, ajouta Sigismund.
— Ces bannières... poursuivit Kane en triant haptiquement la profusion d'informations qui lui parvenait des rares satellites encore en orbite autour de la planète. Ce sont celles d'Urtzi Malevolus. Bon sang ! Il y en a des quantités ! Pourrez-vous tenir face à une armée de cette importance, premier capitaine ? Il faut sauver Mondus Occulum !
Sigismund hésita. Il était tiraillé entre le désir d'exercer de sanglantes représailles contre les renégats qui avaient osé se rebeller contre l'Empereur et l'ordre de mission que lui avait donné son primarque, suivant lequel il devait sauver les armures et les armes de la forge de Kane.
Il soupira.
— Non, c'est impossible. Les forces rassemblées contre nous sont trop importantes, et mes ordres ne me permettent pas de me laisser aller à de futiles bravades.
— De futiles bravades ? s'exclama Kane. C'est de ma forge que nous parlons ! Que pourrait-il y avoir de moins futile que de défendre l'endroit même où sont produites les armures qui vous protègent et les armes que vous portez ?
Sigismund secoua la tête.
— Je n'ai pas le temps de débattre de ce sujet avec vous, Kane. Faites accélérer les opérations de chargement par tous les moyens disponibles mais, quoi qu'il en soit, nous devrons avoir quitté les lieux dans l'heure ou nous ne pourrons plus partir du tout. C'est simple, vous saisissez ?
— J'ai compris ! aboya Kane sèchement. Mais vous, vous devez bien comprendre que si Mondus Occulum et Mondus Gamma sont perdues, vous n'aurez plus aucun moyen de compenser vos pertes au combat de manière significative !
Sigismund ouvrait la bouche pour répliquer lorsque l'une des tours Tsiolkovsky fut secouée par une déflagration.
Le gigantesque édifice se mit à cracher des flammes, et une pluie de débris commença à tomber paresseusement de la section endommagée de la tour. Ses câbles de soutènement d'un mètre de diamètre se rompirent dans un claquement musical, et d'épaisses volutes de fumée noire montèrent de l'endroit de l'explosion. Un terrible grincement discordant déchira l'atmosphère, un cri de métal torturé et de nanotubes de carbone déchiquetés, tandis que la tour s'inclinait et ondoyait comme si elle n'avait pas plus de résistance qu'une corde suspendue dans les airs.
De nouvelles explosions résonnèrent plus haut, sur le pourtour du cratère, et les échos des détonations roulèrent sur les terrains de l'astroport.
— Nous n'avons plus le temps, Kane, gronda Sigismund. Nous sommes déjà dans leur ligne de mire.
La tour s'effondra dans un chapelet de détonations retentissantes, répandant dans son sillage une marée de gravats et de pièces de métal tordues suffisante pour recouvrir une cité. De gigantesques manufactoria, des forêts de hautes cheminées de refroidissement et des kilomètres carrés de paysage industriel furent pulvérisés, et des zones de production entières furent rayées de la carte, rasées en moins d'une seconde sous la monstrueuse masse de débris.
Une énorme vague de poussière et de cendre se répandit à partir de la zone où la tour était tombée, comme l'onde de choc d'une explosion atomique. Le sol trembla sous la force des impacts, et Sigismund entendit résonner de nouvelles détonations. L'ennemi pilonnait les zones extérieures du complexe industriel qui entourait la forge.
Un grondement de trompe roula comme un coup de tonnerre sur les terrains de l'astroport, et Sigismund leva la tête juste à temps pour apercevoir un bataillon d'immenses silhouettes qui émergeaient d'un mur de fumée rougeoyante, illuminée par les flammes qui ravageaient les vestiges de la tour. Six Titans Warlord au fuselage noirci et couvert de scarifications rugissaient leur triomphe. Leurs canons flamboyaient d'un feu apocalyptique, réduisant en miettes les silhouettes élancées de hautes tours et vaporisant des zones entières de la forge.
— Embarquez dans votre vaisseau, Kane, ordonna Sigismund. Immédiatement !
— Ma forge ! s'écria Kane. Nous ne pouvons pas l'abandonner ainsi !
Sigismund l'agrippa fermement par le bras.
—Votre forge est déjà perdue ! Maintenant, embarquez dans votre foutue navette. Nous aurons besoin de vous et de votre savoir dans les jours qui s'annoncent !
— Que voulez-vous dire ?
— Je veux dire qu'avec la trahison de Kelbor-Hal, vous êtes à présent le fabricator général !
— Mais Zeth ? Et Maximal ? hurla Kane par-dessus le vacarme assourdissant, de plus en plus violent à mesure que les Titans approchaient, anéantissant tout sur leur passage. Que va-t-il leur arriver ?
— Nous ne pouvons plus rien pour eux ! hurla Sigismund en retour. Ils doivent trouver le moyen de résister par leurs propres moyens ou bien mourir !
Bouche bée, Dalia fixait l'espace vide où se trouvait Séverine encore un instant auparavant. Elle ne parvenait pas à comprendre ce qui venait de se produire, et son cerveau luttait pour assimiler la notion que son amie était morte.
Elle tituba, horrifiée, en direction du rebord du promontoire, mais une main puissante la retint par le bras. Rho-mu 31 la tenait d'une poigne ferme.
— Ne faites pas ça, lui dit-il.
— Séverine ! gémit Dalia.
Ses jambes se ramollirent comme un carton mouillé et cédèrent sous son poids. Rho-mu 31 la soutint et la déposa avec douceur sur le sol tandis qu'elle éclatait en sanglots déchirants. Elle s'accrocha à lui et enfouit son visage dans sa cape, pleurant son amie disparue.
— Pourquoi a-t-elle fait ça ? demanda-t-elle enfin une fois que ses sanglots furent calmés.
— Je l'ignore, répondit-il.
Zouche s'approcha, derrière elle, et lui posa la main sur l'épaule maladroitement, pour tenter de la réconforter.
— Je pense que notre Séverine était une femme dont toute l'existence reposait sur des certitudes, articula Zouche d'un ton songeur. Cet endroit... eh bien, il nous dépouille des illusions qui nous permettent de continuer à fonctionner et nous montre qu'il n'existe pas de certitudes dans cet univers. Certains esprits ne sont pas équipés pour supporter ce genre de vérités.
— Elle est partie, murmura Dalia.
— Oui, Dalia, ma fille, elle est partie, répéta Zouche d'une voix serrée par l'émotion. Avec tout ce que nous avons traversé, je suis même surpris que la plupart d'entre nous soient encore là.
— Caxton ! cria Dalia en se souvenant soudainement que, la dernière fois qu'elle l'avait vu, il gisait inconscient sur le sol.
— Je crois qu'il va bien, lui dit Rho-mu 31 tandis qu'elle se libérait de son étreinte et se relevait sur ses jambes flageolantes. Il s'est évanoui lorsque tout est devenu... bizarre.
— Comme s'il avait un fusible ou un coupe-circuit, extrapola Zouche en se dirigeant vers le pupitre sur lequel se trouvait toujours le livre de Semyon. Il ira très bien quand il aura repris conscience.
Dalia vit Caxton, toujours étendu, en position latérale de sécurité. Sa poitrine se soulevait régulièrement. Il était vivant, et elle pouvait sentir que les zones contusionnées de son esprit commençaient déjà à guérir. Elle se demanda comment elle pouvait percevoir de telles choses, puis se souvint de la puissance qui avait envahi son organisme lorsque Semyon avait disparu.
— Tant mieux, dit-elle. J'aurais du mal à supporter l'idée que cet endroit puisse causer plus de morts.
Zouche prit une poignée de la poussière dorée qui était tout ce qui restait de l'adepte Semyon et de son serviteur de combat.
— Que s'est-il passé ? dit-il. Ils ont vieilli d'un millier d'années en un instant.
— Plus que ça, je pense, répondit Dalia. Je pense que cela fait vraiment très longtemps que Semyon était le gardien.
— Qu'allons-nous faire, à présent ? demanda Zouche en parcourant du regard les pages du livre. Nous avons trouvé le dragon. Allons-nous le libérer ?
— Non, absolument pas, répondit Dalia. Tu avais raison, après tout, Zouche. Il y a des choses qui doivent rester dans les ténèbres pour l'éternité. Notre mission n'a jamais été de venir ici pour le libérer.
— Alors pour quelle raison deviez-vous venir jusqu'ici ? lui demanda Rho-mu 31.
— Je pense que vous le savez, répondit Dalia en se détournant de Zouche et en regardant Rho-mu 31. Des paillettes de lumière dorée dansaient dans son regard. Pour s'assurer qu'il ne sortira pas de sa prison. Semyon est mort, mais il faut un gardien pour le dragon.
— Et ce gardien, c'est vous ? lui demanda Rho-mu 31.
— Oui.
— Non, Dalia ! s'écria Zouche. Dis-moi que ce n'est pas vrai ! Toi ?
— Oui, répondit Dalia. Cela a toujours été ma destinée, mais je ne serai pas seule. Qu'en pensez-vous, Rho-mu 31 ?
Celui-ci se redressa de toute sa taille et planta le bout de son bâton énergétique en terre, puis il s'agenouilla devant Dalia.
— Aussi longtemps que je serai fonctionnel, je vous protégerai.
— Avec le pouvoir que je détiens à présent, cela pourrait durer très longtemps, mon ami.
— Qu'il en soit ainsi, répondit simplement Rho-mu 31.
Zouche et rho-mu 31 se relayèrent pour porter Caxton le long des galeries sinueuses du labyrinthe du dragon. Dalia marchait en tête et les guida sans se tromper le long du chemin qu'ils avaient suivi pour descendre. Ils étaient tous d'humeur plutôt mélancolique car la mort de Séverine leur pesait lourdement sur le cœur, et ils ne dirent pas un mot en traversant le laboratoire de Semyon à présent abandonné. Ils repassèrent par les tunnels aux parois luminescentes qui menaient aux crevasses ténébreuses du Noctis Labyrinthus et finirent par émerger dans l'atmosphère glaciale.
— Je crois que je déteste cet endroit, haleta Zouche en laissant Rho-mu 31 le débarrasser de Caxton, toujours inconscient.
Le protector hissa Caxton sur son épaule d'une poussée.
— Je ne peux pas te blâmer, répondit Dalia. C'est un lieu de désespoir, depuis toujours, et je pense que si les gens ont toujours fui cet endroit, c'est à cause du dragon, mais pas seulement de lui.
—Tu es vraiment sûre que tu dois rester ici ? demanda Zouche, les yeux pleins de larmes.
— Certaine, répondit Dalia en se penchant pour le serrer dans ses bras.
Il la prit dans ses bras et la serra contre lui, laissant ses larmes couler sans honte.
— Je ne te reverrai jamais, hein ? dit-il enfin lorsqu'elle l'eut lâché.
Elle secoua la tête.
— Non. Et tu ne pourras jamais parler de moi ou de cet endroit à quiconque. Si jamais on te le demande, il faudra dire que j'ai été tuée lorsque la machine de Kaban nous a attaqués, dans le tunnel.
— Qu'est-ce que je vais dire à Caxton, alors ? demanda Zouche en s'essuyant les yeux de la manche de sa robe.
Dalia réprima un sanglot.
— Dis-lui... dis-lui que je pense que j'aurais pu l'aimer. Et dis-lui que je suis désolée de ne pas avoir eu l'occasion de le découvrir.
— Je lui dirai, compte sur moi, acquiesça Zouche avant de se tourner vers Rho-mu 31. Alors vous restez, vous aussi ?
— Je reste, répondit celui-ci. Il semble que chaque gardien doive avoir un protecteur.
Zouche lui serra la main et regarda derrière son épaule. L'épave du camion était toujours là, à l'endroit où ils l'avaient laissée, non loin de l'entrée de la caverne.
— Heu... une pensée en passant. Comment sommes-nous censés rentrer ? La batterie du camion n'était-elle pas morte ?
Dalia sourit, et la luminescence dorée que lui avait transmise l'adepte Semyon fit flamboyer son regard.
— Je pense pouvoir faire le nécessaire pour lui donner suffisamment d'énergie pour vous ramener à la cité du magma.
Zouche haussa les épaules, et ils se dirigèrent vers le camion abandonné.
— Je ne suis pas sûr de vouloir savoir comme tu comptes réussir un tour comme ça, mais je n'ai jamais été du genre à remettre ma chance en doute quand j'en avais. Enfin bon, j'en ai jamais eu tellement non plus, si tu vois ce que je veux dire.
Le camion explosa soudainement dans un fracas de tonnerre dont les échos roulèrent entre les parois à pic du Noctis Labyrinthus. L'onde de choc les catapulta au sol sous une pluie de débris fumants.
Dalia releva la tête en battant des paupières pour chasser la rémanence lumineuse de l'explosion.
— Qu'est-ce qui s'est passé ? haleta Zouche.
Dalia poussa un gémissement en apercevant la silhouette de leur agresseur qui roulait dans leur direction sur ses énormes chenilles.
— Oh non, souffla-t-elle. Oh, par l'Empereur qui nous protège, non !
C'était la machine de Kaban.
Très haut, dans la chambre de Vesta, l'adepte Koriel Zeth ouvrait des yeux pleins d'horreur et d'incrédulité devant les images de combats que lui renvoyaient les écrans polis de sa forge.
L'écran principal montrait sa propre forge, une cité au bord de l'effondrement. Les ruches extérieures et les manufactoria étaient en ruines. Tout ce qu'elle avait bâti au fil des siècles avait été démantelé, broyé par les sauvages et implacables bombardements du Mechanicum noir.
Ipluvien Maximal ne s'en sortait guère mieux. Les renforts qui devaient le soulager reculaient devant la violence et la brutalité des monstrueuses créations de Kelbor-Hal. Les remparts extérieurs de Maximal avaient cédé en une dizaine de points, et les combats se répandaient des armureries aux raffineries de minerai et au librarium, à mesure que les hordes de serviteurs mutés envahissaient la forge, accompagnés d'abominables machines de guerre.
Mondus Occulum et Mondus Gamma étaient en flammes. De vastes étendues d'usines et de manufactoria avaient été ravagées en l'espace de quelques heures. La perte de cet irremplaçable trésor de savoir et de technologie lui fouaillait les entrailles comme une dague, mais l'image que lui renvoyait le panneau d'affichage central était pire, bien pire encore.
Comme des comètes s'élançant vers les cieux, les vaisseaux impériaux fuyaient Mars. Les vaisseaux de l'Astartes et les navettes de l'armée impériale se bousculaient littéralement dans l'atmosphère dans leur hâte à quitter la planète rouge.
Lorsque ses systèmes de surveillance lui avaient signalé leur décollage, Zeth avait d'abord pensé qu'ils s'apprêtaient à décrire un vol parabolique pour retomber en direction de la cité du magma, plus au sud, mais leur ascension flamboyante ne s'était pas interrompue, et il lui avait bientôt paru évident qu'ils accéléraient afin d'atteindre la vélocité nécessaire pour échapper à l'attraction planétaire.
La confirmation de leur départ, s'il en était besoin, lui parvint peu de temps après sous la forme d'un laconique message crypté émanant du fabricator supplétif qui, semblait-il, était également sur le point de quitter Mars.
+++Les forces impériales se retirent+++sauvez ce qui peut l’être+++Détruisez le reste+++
La partie humaine de son être hurlait d'indignation devant une telle trahison, mais la partie analytique dominante de son cerveau comprenait parfaitement la logique de ce mouvement. L'Astartes avait sans aucun doute réussi à sauver une bonne partie des nouveaux modèles d'armures en préparation pour la campagne contre les légions d'Horus Lupercal. Courir le risque de tout perdre pour tenter une ultime résistance désespérée n'avait aucun sens.
Cependant, ce n'était parce que c'était logique que la pilule était plus facile à avaler.
Zeth ouvrit sa liaison noosphérique avec Ipluvien Maximal, le princeps Cavalerio de la Legio Tempestus et les seigneurs Caturix et Verticorda des chevaliers de Taranis.
— Je suppose que vous avez tous vu la même chose que moi ? leur demanda-t-elle lorsque leurs images holographiques apparurent sur les panneaux de verre au-dessus de sa tête.
— J'ai vu, répondit Cavalerio, dont l'image était celle de l'homme qu'il avait été avant d'être enfermé dans sa cuve amniotique.
— Oui, confirma Maximal. Je n'en crois pas mes yeux. Tout ce savoir qui s'en va en fumée...
Caturix secoua la tête, accablé.
— En arriver là. Être abandonnés par Terra.
— Jamais ! se récria Verticorda. L'Empereur ne nous aurait jamais abandonnés !
— C'est possible, répondit Zeth. Mais il semblerait que nous n'ayons plus aucune aide à attendre des légions.
— Quels sont vos ordres, adepte Zeth ? lui demanda Cavalerio.
—Vous avez reçu la transmission de Kane ?
Leur silence lugubre était une réponse suffisante.
— Je ne laisserai pas Kelbor-Hal s'emparer de mes réacteurs, articula enfin Maximal.
— Et je ne le laisserai pas mettre la main sur le décodeur akashique, ajouta Zeth tristement. J'espérais tellement que Dalia parviendrait à le faire fonctionner, mais c'est peut-être pour le mieux. Peut-être que personne ne devrait disposer du savoir universel. Après tout, quelle raison de vivre nous resterait-il si nous savions déjà tout ?
— Dans ce cas, il ne nous reste plus qu'un seul ordre à donner, dit Verticorda.
Dalia regarda le robot meurtrier rouler dans leur direction, pulvérisant les pierres sous son poids, armes levées, prêtes à tirer. Les canons de ses énormes mitrailleuses tournèrent en vrombissant, en préparation d'une nouvelle salve. Un jet de vapeur jaillit en sifflant des évents du canon à plasma monté sur ses épaules.
Elle pouvait goûter sa fureur, la haine qu'il éprouvait à son égard, dans la lueur incandescente des orbes de ses senseurs. D'un rapide frôlement de l'esprit, elle comprit qu'elle ne parviendrait pas à le tromper une seconde fois.
— Comment est-ce qu'il nous a retrouvés ? cria Zouche.
— Il a dû capter nos ondes biométriques dans le tunnel, cria-t-elle en retour. Il a fini par se rendre compte de son erreur et nous a suivis jusqu'ici.
— Quelle importance, la manière dont il nous a retrouvés ? hurla Rho-mu 31 en activant son bâton énergétique et en entraînant Dalia dans la direction d'où ils étaient venus. Courez ! Retournez à la caverne ! Il ne pourra pas nous suivre à l'intérieur !
Dalia acquiesça de la tête, attrapa la main de Zouche et se mit à courir en direction de la gueule de la caverne.
— Fais ce que tu as fait la première fois ! cria Zouche. Fais-lui croire que nous ne sommes pas là !
— Je ne peux pas, répondit-elle d'une voix entrecoupée. Il a appris ce que je lui ai fait, et son architecture mentale a évolué pour m'empêcher de recommencer.
Regardant par-dessus son épaule, elle vit les tentacules métalliques se redresser brutalement sur le dos du robot.
— À terre ! beugla Rho-mu 31 en les plaquant au sol.
Ils tombèrent brutalement et roulèrent, se laissant tomber dans un sillon peu profond qui devait être le lit d'un très ancien ruisseau tandis qu'une volée de décharges de laser passait en rugissant au-dessus d'eux et labourait le sol de la vallée en y laissant des lacérations incandescentes.
Zouche poussa un cri aigu lorsqu'un fragment de roche acéré lui taillada la joue.
Certaine qu'une nouvelle salve était sur le point de mettre un terme à leur existence, Dalia sentit ses yeux s'emplir de larmes d'amertume.
Elle tressaillit et se roula en une boule de terreur lorsqu'un assourdissant rugissement et un staccato de détonations résonnèrent entre les parois de la gorge. Une nouvelle série d'explosions tonitruantes firent résonner le canyon, et Dalia ouvrit des yeux stupéfaits en réalisant que les tirs n'étaient pas dirigés contre eux.
— C'est incroyable ! s'écria Rho-mu 31.
Levant la tête, Dalia vit ses yeux verts et luminescents briller de surprise derrière son masque de bronze.
En se redressant sur un coude, elle risqua un regard pardessus le rebord labouré et encore fumant de leur fragile rempart.
La machine de Kaban était toujours là, mais elle était environnée de décharges d'énergie et ses boucliers émettaient un sifflement strident tandis qu'elle luttait pour maintenir leur intégrité.
Deux glorieuses machines de guerre en armure bleu nuit s'avançaient dans sa direction. Sur leurs épaulières, elle aperçut le symbole d'une roue entourant un éclair.
— Les chevaliers de Taranis ! cria Rho-mu 31.
Le cœur de Maven s'emplit d'une joie sauvage, primale, en voyant la machine ennemie chanceler sous les impacts de ses armes. Cronus avait atteint sa cible, lui aussi, et le multiface d'Equitos Bellum s'embrasa, illuminé par la certitude qu'ils venaient enfin de retrouver leur proie. Ses chargeurs automatiques grondèrent en injectant de nouvelles munitions dans le canon monté sur son bras, et il sentit monter la chaleur en dégainant de la main droite sa grande lame de guerre longue de quatre mètres.
La machine était exactement comme dans son souvenir, courtaude et laide à regarder, une grosse boule de haine, de mort et de destruction, dissimulée derrière les voiles ondoyants de ses boucliers protecteurs. Sur les écrans scintillants de son auspex, il lut sa signature énergétique. La machine cessa le feu et se retourna pour leur faire face, et il fut frappé par l'intelligence froide, étrangère au genre humain, qui semblait se dégager des orbes jaunâtres de ses senseurs.
Un petit groupe d'individus tentait de s'abriter de ses tirs en se cachant dans un fossé peu profond au rebord déchiquêté. Il y avait un protector en cape rouge et trois autres personnes. Il ne savait pas qui ils pouvaient bien être, mais la machine voulait les tuer, et c'était une raison suffisante pour les défendre.
— Prends-le par la droite, voxa-t-il à Cronus. On la prend comme on a dit.
Cronus était déjà en mouvement. Fax Mortis s'élança à grandes enjambées bondissantes sur le fond rocailleux et inégal de la vallée, abaissant sa carapace au ras du sol, ses bras d'armes tendus devant lui, en position de tir. Maven obliqua vers la gauche et pilonna la machine d'une nouvelle salve.
Les boucliers de leur ennemie émirent un nouveau sifflement, et Maven sentit monter une poussée d'adrénaline en goûtant l'euphorie de sa monture. Equitos Bellum avait toujours adoré le combat, mais le bonheur qu'il ressentait à se retrouver enfin devant leur némésis lui procurait une sensation supérieure à tout ce qu'il avait pu éprouver au cours de son existence.
En se baissant, il se précipita rapidement vers un affleurement rocheux qu'il avait aperçu de loin, lorsqu'ils étaient arrivés. La machine ouvrit le feu et le manqua de peu. Il sentit la chaleur des projectiles qui passaient au-dessus de lui. Sa perception instinctive du champ de bataille était totale, ses intuitions tactiques parfaites. Il tira soudainement sur les manettes de contrôle et s'arrêta en dérapage, une jambe sur le côté pour compenser cette soudaine modification de trajectoire.
Le tir de barrage s'écrasa contre l'affleurement qui explosa dans une déflagration tonitruante, réduit en miettes de pierre. À sa place, il ne restait plus qu'un cratère fumant. Maven bondit de côté et en avant, zigzaguant au hasard à travers la vallée, évitant délibérément d'employer les techniques d'esquive standard.
Des décharges de laser et des balles traçantes dessinèrent des pointillés aux endroits où la machine s'attendait à le voir aller.
Maven se mit à rire, un rugissement de joie pure et sauvage, en sentant Equitos Bellum répondre à la moindre de ses sollicitations, collaborant avec lui de toute la force de ses membres et de toute l'ardeur de son cœur blessé pour tromper leur adversaire. Une fois encore, il changea de direction au hasard, éperonnant sa monture pour la jeter droit sous le feu des canons de leur ennemie.
— Le vieux Stator me ferait arracher les tripes s'il me voyait en ce moment, murmura-t-il, luttant contre des décennies d'entraînement pour s'empêcher d'utiliser les manœuvres qu'il maîtrisait si bien et qui faisaient de lui le formidable guerrier qu'il était.
La machine ouvrit le feu une nouvelle fois, mais cette fois encore Maven avait déjoué ses plans. Ses déplacements imprévisibles et ses zigzags à brûle-pourpoint perturbaient son neurogiciel de visée. Maven l'observa. Elle reculait, et ses canons principaux tournaient sur leurs cardans tandis qu'elle essayait de prévoir dans quelle direction il bondirait. Les armes montées sur ses épaisses dendrites souples pivotèrent, et elle tira sur les restes du camion en flammes. Cronus faisait avancer son Chevalier en lui faisant décrire des courbes ponctuées d'arrêts brusques et de redémarrages foudroyants toutefois, en voyant les retours bouclier de son frère d'armes, Maven se rendit compte que sa monture avait reçu plusieurs projectiles.
— Embrouille-la plus que ça, Cronus ! cria-t-il. Ne fais rien qu'elle puisse prévoir !
— Boucle-la ! riposta sèchement Cronus. Tu violes les règles sans arrêt ! Ce n'est pas si facile pour moi !
Maven sourit largement en voyant la machine reculer devant lui, faisant gicler des éclats de roches sous ses chenilles dans sa précipitation frénétique à faire marche arrière vers la paroi du canyon.
Il lâcha une nouvelle bordée. Des morceaux de roche se détachèrent de la falaise lorsqu'elle pivota sur une chenille, esquivant ses tirs, et que ses projectiles la manquèrent.
— Par l'enfer ! s'exclama-t-il. Elle apprend vite !
Il recula à son tour pour changer de trajectoire et réalisa trop tard son erreur.
Une volée de décharges de laser incandescentes pilonna ses boucliers frontaux, et l'émetteur de son torse explosa avec un glapissement suraigu. Il poussa un cri lorsque la vague d'énergie reflua sur lui et le souffleta, dans une bourrasque de parasites grésillants.
Equitos Bellum chancela, et Maven fit poser un genou en terre à sa monture. Une nouvelle décharge frappa de plein fouet la partie supérieure de sa carapace, et des lances de souffrance lui traversèrent l'épaule. Il essaya de faire pivoter sa monture, afin de présenter à l'ennemi ses boucliers encore en état de marche. De nouvelles décharges le frappèrent, et Maven ressentit la douleur d'Equitos Bellum lorsque ses plaques d'armure se déchirèrent sous la brutalité des impacts.
Le vitrage blindé de son cockpit vola en éclat, explosant vers l'intérieur, et des fragments de verre aiguisés comme des rasoirs lui lacérèrent le visage.
— Cronus ! hurla-t-il, traversé d'une douleur fulgurante lorsqu'un nouveau projectile le frappa.
Pax Mortis traversa les débris enflammés du camion. Ses deux bras d'armes étaient auréolés de flammes. La machine ennemie disparut derrière un feu d'artifice flamboyant. Ses boucliers avaient plié sous les impacts, mais ils n'avaient pas cédé.
Le réacteur qui brûlait en son cœur, quelle que soit sa nature, était apparemment capable d'encaisser. Les canons de la machine se tournèrent en direction de Pax Mortis et aboyèrent sauvagement, crachant une canonnade qui transperça ses boucliers et le blindage qui protégeait sa monture médiane, à la taille.
Le Chevalier tituba, et Cronus le fit bondir en direction du mur de fumées noires qui montait toujours du camion, mais la machine s'attendait à cette réaction trop évidente. Une décharge de plasma incandescente s'écrasa sur la carapace supérieure de Pax Mortis, manquant le faire tomber à genoux.
Maven poussa un cri de désespoir en voyant chanceler son frère chevalier, mais avant que la machine ennemie n'ait eu le temps de l'achever, Cronus bondit en avant et disparut dans la fumée.
— Ses boucliers sont trop résistants ! cria Cronus. Sa souffrance était perceptible, même sur le vox. Nous ne parviendrons pas à les surcharger avec nos armes !
Cronus s'était dangereusement exposé en venant au secours de son frère d'armes, mais leur assaut, mené depuis deux directions différentes, avait forcé leur adversaire à agir selon leur volonté, et ils n'auraient probablement pas de nouvelle ou de meilleure occasion.
— Prépare-toi ! cria Maven. Nous l'avons amené où nous voulions !
Se voyant confrontée à deux ennemis et cherchant à limiter le nombre d'angles de tir possibles, la machine avait reculé pour se placer contre la paroi de la falaise.
Exactement comme Maven l'avait prévu.
C'était une manœuvre standard, décrite dans tous les manuels.
Maven débraya les viseurs automatiques.
— Tu connais l'air, mais pas la chanson, ma biche, murmura-t-il en ouvrant le feu une nouvelle fois.
Au lieu de viser leur ennemie, il tira dans la paroi rocheuse juste au-dessus. Dans un roulement de tonnerre, une avalanche de rochers colossaux s'abattit leur adversaire, écrasant les vecteurs supérieurs de ses boucliers. Des fleurs de feu s'épanouirent autour de la machine, et ses boucliers poussèrent des hurlements de protestation suraigus, pourtant, incroyablement, ils résistèrent.
— Cronus ! Maintenant ! hurla-t-il en forçant sa monture blessée à se relever et en chargeant son ennemie avec un féroce cri de guerre.
Il ouvrit le feu de tous ses canons, martelant les boucliers supérieurs de la machine à coups redoublés. À travers l'avalanche de rocaille et de poussière qui se déversait toujours sur elle, celle-ci le vit venir et orienta ses canons dans sa direction, à l'instant où Pax Mortis surgissait de la fumée et joignait ses tirs à ceux d'Equitos Bellum.
Déjà durement éprouvés par la pluie de rocs qui se décrochaient de la falaise, ses générateurs de boucliers cédèrent enfin sous les tirs des deux Chevaliers.
Ses boucliers explosèrent, dans une onde de choc aveuglante, arrachant ses dendrites métalliques de son dos et vaporisant son bras gauche dans une détonation tonitruante. Ses flancs ouverts vomirent un nuage de fumée et une cascade d'étincelles, et ses senseurs clignotèrent follement, comme incapables d'admettre qu'elle ait pu être blessée de la sorte.
Elle vacilla en arrière, choquée, hurlant un torrent confus de code binaire qui lacéra le multiface et fit sauter plusieurs augméteurs à l'intérieur du cockpit de Maven.
Celui-ci se rua dans le nuage de poussière de pierre, les yeux fixés sur la silhouette sphérique de l'ennemie qu'il traquait depuis si longtemps. Elle était mortellement blessée, mais elle avait encore la force de combattre. Maven ne lui donna pas l'occasion de le faire. Il plongea les quatre mètres de sa lame énergétique, jusqu'à la garde, dans sa partie frontale.
Elle poussa un cri d'agonie qui s'amenuisa jusqu'à n'être plus qu'un gémissement pitoyable de codes binaires torturés, mais Maven fouailla la blessure de sa lame jusqu'à ce que les cris cessent et que la lumière jaune de ses senseurs s'éteigne enfin.
Laissant échapper un long soupir de souffrance et de fureur contenue, Maven recula, abandonnant la machine morte. Devant l'épave inerte de son ennemie vaincue, il ressentit un puissant sentiment d'achèvement. La souffrance psychostigmatique que lui causaient ses blessures s'amenuisa, et il sourit en sentant la satisfaction d'Equitos Bellum monter en lui comme une vague d'approbation et de contentement.
L'essence de ce qui faisait des Chevaliers d'aussi redoutables machines de guerre se diffusa dans sa chair meurtrie, soulageant ses souffrances, se répandant dans son corps et coulant dans ses membres douloureux.
Trop tard, Maven sentit l'âme de sa monture affluer en lui et réalisa que la vague apaisante et consolatrice le manipulait, comme s'il était la monture et Equitos Bellum l'écuyer. Il sentit la pulsation sauvage, féroce du cœur de sa machine, la puissance terrifiante qui animait le cœur du multiface, prendre le contrôle de ses membres et faire pivoter Equitos Bellum en direction de la tranchée où les proies de la machine ennemie s'étaient réfugiées.
À travers les restes du vitrage de son cockpit, il aperçut un protector du Mechanicum qui marchait vers lui, accompagné d'une petite femme à la frêle silhouette dont les yeux brillaient d'une lumière dorée. La cape rouge du protector claquait au vent, et son bâton énergétique portait le symbole de la grille numérique qui était l'emblème de Koriel Zeth. Derrière eux, il vit un homme de petite taille, en robe, agenouillé à côté de la silhouette allongée de ce qui ressemblait à un domestique à la tête tonsurée.
Maven entendit le pas lourd de Pax Mortis à ses côtés. Il voulu parler à Cronus, mais la force élémentaire du multiface l'immobilisait fermement dans sa poigne.
La femme s'approcha du Chevalier blessé et, avant qu'il n'ait pu réaliser ce qui se passait, Equitos Bellum se laissa tomber sur un genou et inclina la tête devant elle. Sans avoir besoin de se tourner, il sut que la monture de son frère d'armes en avait fait autant.
Elle tendit la main et la posa sur lui, et Maven sentit une douce chaleur envahir chaque molécule de son existence hybride de chair et d'acier, l'imprégnant d'une vitalité et d'une détermination nouvelles. Il sentit la tiédeur de sa main à travers l'armure de sa monture et eut un hoquet de surprise en sentant un tremblement monter dans sa grande carcasse de plastacier et de céramite.
— Machine, sois guérie et marche ! dit-elle.